Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés Filippo Grandi s’entretient avec Abdulaziz Lugazo, réfugié somalien, dans le camp de réfugiés de Kakuma au Kenya. © HCR/Samuel Otieno

En cette Journée mondiale du réfugié, nous mettons à l’honneur le courage et l’espoir des millions de personnes à travers le monde qui sont contraintes de fuir la guerre, la violence et la persécution. Cette année, je célèbre cette journée au Kenya, aux côtés de réfugiés pleins de force et d’ambition, malgré les conflits, la sécheresse et toutes les horreurs qui les ont poussés à fuir.

Aujourd’hui, dans le camp de réfugiés de Kakuma, j’ai rencontré Abdulaziz Lugazo, qui préside une coopérative d’agriculteurs qui cultivent des espèces résistantes à la sécheresse, comme les épinards, le gombo ou le chou vert. Abdulaziz a grandi dans la ferme familiale en Somalie et, lorsqu’il a été contraint de fuir en 1990, il ne pensait pas pouvoir un jour cultiver à nouveau la terre. Aujourd’hui, il travaille avec d’autres réfugiés et des agriculteurs kenyans sur des terres mises à disposition par le gouvernement et gagne suffisamment d’argent pour payer les manuels scolaires et les uniformes de ses enfants.

Abdulaziz souhaitait vivement pouvoir mettre ses compétences au service de ses camarades réfugiés et travailler au sein de la communauté kenyane qui l’accueille. Grâce à la politique d’intégration de plus en plus poussée menée par le gouvernement kenyan à Kakuma, il est en mesure d’apporter sa contribution à la vie de sa communauté d’accueil et de s’épanouir dans son travail.

Le Kenya et le peuple kényan accueillent généreusement des réfugiés depuis plus de 30 ans. Au cours de mes innombrables visites dans le pays, j’ai pu constater l’impact des nombreuses mesures concrètes et positives prises afin d’améliorer les conditions de vie des réfugiés et celles des communautés d’accueil.

Je profite de ce déplacement dans le pays pour rappeler au reste du monde que nous pouvons – et devons – faire davantage pour offrir de l’espoir, des opportunités et des solutions aux réfugiés, où qu’ils se trouvent et quel que soit le contexte. Le Kenya nous montre que c’est possible.

L’intégration des réfugiés dans les communautés au sein desquelles ils ont trouvé refuge est le moyen le plus efficace de les aider à reconstruire leur vie et à contribuer au bien-être des pays qui les accueillent.

En termes concrets, cela signifie qu’il faut faire en sorte que les réfugiés puissent postuler à des emplois, s’inscrire dans les écoles et accéder à des services tels que le logement et les soins de santé. Il s’agit également de tout mettre en œuvre pour créer un sentiment d’appartenance et une dynamique d’accueil qui redonnent de l’espoir à ces personnes déracinées.

Le gouvernement kenyan est prêt à adopter des politiques innovantes et inclusives qui devraient permettre à une grande partie du demi-million de réfugiés et de demandeurs d’asile présents dans le pays de travailler et de vivre côte à côte avec les Kenyans. Cette démarche favorise l’autonomie, la croissance économique et la réduction de la dépendance à l’égard de l’aide humanitaire.

Au HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, nous savons que l’intégration est le meilleur moyen pour soutenir les réfugiés en exil, pour les préparer à contribuer à la reconstruction de leur pays lorsque les conditions leur permettront d’y retourner, ou à s’épanouir s’ils sont réinstallés dans un pays tiers.

Mais les pays d’accueil ne peuvent remplir cette mission à eux seuls. Le reste de la communauté internationale doit se mobiliser et fournir les ressources financières nécessaires à la mise en œuvre de ces politiques volontaristes. Nous avons constaté d’énormes progrès à cet égard au cours des dernières années, grâce à la générosité exceptionnelle des donateurs, à des approches innovantes en matière de financement et à des investissements considérables de la part de la Banque mondiale, des banques régionales de développement et d’autres institutions financières internationales. Mais il est clair qu’il faut faire davantage.

Le temps est venu pour nous tous de nous engager à inclure les réfugiés au sein de nos communautés à tous les niveaux – dans nos écoles, sur nos lieux de travail, dans nos systèmes de soins de santé et même au-delà, comme le fait le gouvernement kenyan, afin que les réfugiés puissent retrouver l’espoir loin de chez eux.

Nous devons également être conscients des défis auxquels sont confrontés les pays d’accueil dans un monde où la paix fait souvent défaut. Le plus souvent, ce sont les communautés vivant aux frontières qui reçoivent et accueillent celles et ceux qui fuient la violence. Le cas des pays voisins du Soudan est un bon exemple de cette solidarité. De nombreux pays d’accueil sont prêts à accueillir et à inclure les réfugiés, mais ils ont besoin de moyens et d’un soutien bien plus conséquents pour y parvenir.

Malheureusement, dans ce monde fragmenté qui est le nôtre aujourd’hui, les solutions à long terme pour les personnes contraintes de fuir restent désespérément rares, laissant dans l’incertitude bon nombre des 35 millions de réfugiés à travers le monde.

C’est pourquoi, en cette Journée mondiale du réfugié, je souhaite conclure en appelant les dirigeants à assumer leur responsabilité à faire la paix afin que la violence cesse et que les réfugiés puissent rentrer chez eux librement et en toute sécurité.

J’appelle aussi les gouvernements à accroître les opportunités de réinstallation pour les réfugiés qui en ont le plus désespérément besoin.

Et j’appelle enfin les États à mettre en œuvre des politiques qui tirent parti de l’énorme potentiel des réfugiés à contribuer à la vie sociale, économique et politique des pays qui les accueillent. Nous ne connaissons que trop bien le coût de l’inaction : un monde dans lequel le déplacement forcé atteint des niveaux record. Nous ne pouvons pas laisser cette situation perdurer.

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