un groupe de six personnes marche sur une route dans une zone désertique, en portant des sacs.

Une famille de Vénézuéliens marche le long de l’autoroute parallèle à la frontière avec le Chili, le 3 décembre 2021, dans la région de Tacna, au sud du Pérou. © UNHCR/Raul Garcia Pereira

Explication du HCR

Par Shabia Mantoo, Geneva


Toute personne amenée à se déplacer d’un pays à l’autre doit pouvoir bénéficier du plein respect de ses droits fondamentaux et de sa dignité. Cependant, les raisons et les motivations qui poussent les gens à quitter leur foyer peuvent varier. Il y a par conséquent des obligations juridiques internationales spécifiques qui s’appliquent à ceux dont la vie était, est ou pourrait être menacée s’ils rentraient chez eux.

Le statut de réfugié est spécifiquement défini et protégé par le droit international. Les réfugiés sont des personnes qui ont fui leur foyer pour échapper à la persécution, aux conflits, à la violence, à de graves violations des droits humains ou à d’autres événements troublant gravement l’ordre public, et qui cherchent à se mettre en sécurité dans un autre pays. Ils ont ainsi besoin d’une « protection internationale » de la part d’un autre pays, dans la mesure où leur pays d’origine ne peut ou ne veut pas les protéger. Ils exercent ainsi un droit humain fondamental et universel : le droit de demander et de bénéficier de l’asile. Selon le droit international des réfugiés, une personne est un réfugié – et doit être traitée comme tel – dès qu’elle répond à cette définition, et ce même si la reconnaissance officielle par les États ou le HCR n’est pas encore intervenue.

Les États ont des obligations spécifiques à l’égard des réfugiés en vertu du droit international :

  • Veiller à ce que les réfugiés puissent accéder à leur territoire et demander l’asile.
  • Ne pas sanctionner les réfugiés qui franchissent les frontières de manière irrégulière (sans autorisation ou documents requis) en quête de sécurité. Il n’y a rien d’illégal à demander l’asile.
  • Garantir le respect, la protection et la mise en œuvre des droits humains fondamentaux des réfugiés.
  • Veiller à ce que les réfugiés ne soient pas expulsés ou renvoyés (« refoulés ») vers des lieux à risque, où leur vie ou leur liberté sont menacées.

Dans certains pays, les réfugiés peuvent avoir accès à d’autres formes de permis de séjour, notamment dans le cadre d’accords de libre circulation, d’un permis de travail ou d’un visa d’étudiant, et peuvent donc choisir de ne pas demander l’asile. Toutefois, ces autres formes de séjour légal ne remettent pas en cause leur besoin ni leur droit à la protection internationale.

Les demandeurs d’asile sont des personnes qui ont l’intention de demander une protection internationale ou qui attendent une décision concernant leur demande. Les États ont l’obligation de faire en sorte que toute personne se présentant à leurs frontières pour demander l’asile puisse accéder à leur territoire, soumettre son dossier et le faire examiner de manière juste et équitable. Bien que tous les demandeurs d’asile ne se voient pas reconnaître le statut de réfugié, toute personne qui présente une demande d’asile doit voir sa demande examinée de manière équitable et objective.

Le terme de « migrant » n’est pas défini de manière spécifique en droit international, mais il est utilisé pour désigner les personnes qui choisissent de franchir des frontières, non pas en raison de menaces directes de persécution, mais pour d’autres raisons, notamment liées au travail, aux études ou à la réunification avec leur famille. D’autres facteurs complexes peuvent également entrer en ligne de compte, comme le fait de fuir des catastrophes environnementales, la famine ou la pauvreté extrême.

Les personnes qui quittent leur pays pour ces raisons n’ont normalement pas besoin d’une protection internationale car, contrairement aux réfugiés, elles continuent, en principe, à bénéficier de la protection de leur propre pays lorsqu’elles se trouvent à l’étranger et lorsqu’elles y reviennent.

Bien qu’ils ne remplissent pas les critères de la définition du réfugié, il se peut que les migrants aient besoin d’assistance, d’aide et de protection de leurs droits à différents moments de leur parcours. Mais ces personnes sont alors protégées par le droit international des droits de l’homme. Dans certaines circonstances, elles peuvent également bénéficier d’une protection contre le retour dans leur pays d’origine ou l’expulsion du pays d’accueil pour des raisons fondées sur les droits humains.

De plus en plus souvent à travers le monde, on assiste à des « mouvements mixtes » où les réfugiés et les migrants empruntent les mêmes itinéraires en franchissant des frontières terrestres ou maritimes. Bien que leur statut juridique et leurs motivations diffèrent, ils peuvent être confrontés à des dangers similaires en cours de route, notamment la violence, les abus et l’exploitation de la part de trafiquants d’êtres humains, de passeurs, de criminels, d’éléments armés, d’autres acteurs malhonnêtes et même de gardes-frontières ou d’autres agents de l’État.

Si de tels incidents survenant lors de voyages en dehors de leur pays d’origine ne transforment pas automatiquement un « migrant » en « réfugié » (car le statut de réfugié dépend de l’incapacité d’une personne à rentrer chez elle en raison du danger, de la violence ou du préjudice qu’elle a fui), tous les États doivent cependant adopter une approche humaine et fondée sur les droits lorsqu’ils accueillent des personnes à leurs frontières. Ils doivent faire en sorte que les personnes ayant besoin d’une protection internationale (réfugiés) puissent rapidement obtenir l’asile, et que les victimes de la traite des êtres humains ou de violations des droits humains – qu’il s’agisse de réfugiés ou de migrants – soient rapidement identifiées et prises en charge.

La communauté internationale reconnaît depuis longtemps la distinction entre réfugiés et migrants, qu’il s’agisse de l’ensemble des textes législatifs élaborés au siècle dernier et spécifiques aux réfugiés (la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967, ainsi que d’autres textes juridiques tels que la Convention de 1969 de l’OUA relative au statut des réfugiés), de la plus récente Déclaration de New York sur les réfugiés et les migrants, ou des deux instruments distincts qui en découlent – le Pacte mondial sur les réfugiés et le Pacte mondial sur les migrations.

Faire l’amalgame n’est pas sans conséquences

On observe une tendance croissante et inquiétante dans le discours public, les médias et les rapports statistiques à utiliser le terme « migrant » comme terme générique pour désigner à la fois les migrants et les réfugiés. Cet amalgame est non seulement inexact, mais il peut avoir de graves conséquences pour les personnes qui ont besoin d’une protection internationale. Désigner à tort les réfugiés et les demandeurs d’asile comme des migrants (ou comme des « illégaux » ou « sans-papiers ») :

  • Décrit incorrectement leur statut juridique spécifique.
  • Entrave leur accès à certaines mesures de protection juridique, notamment le droit de franchir les frontières pour demander et bénéficier de l’asile.
  • Dilue la responsabilité des États – en minimisant les obligations spécifiques qu’ont les États de respecter leur droit de demander l’asile sans distinction, et quel que soit leur mode d’arrivée.
  • Met leur vie et leur sécurité en danger – en ne les identifiant pas dans le cadre de mouvements mixtes et en ne leur fournissant pas la protection dont ils ont besoin, ce qui les expose à de nouveaux dangers.
  • Ne tient pas compte de leur parcours, des dangers et des risques auxquels ils ont été confrontés en raison des guerres, des conflits et des persécutions.
  • Alimente le soutien aux politiques de lutte contre le droit d’asile et les réfugiés – refus d’accès au territoire et à l’asile, renvois aux frontières terrestres ou en mer, violences et mauvais traitements aux frontières, renvois vers des situations de danger (refoulement) et tentatives de déviation ou d’« exportation » des obligations en matière d’accueil vers l’étranger (politiques d’extériorisation de l’asile).

Dans un souci de précision et de clarté, et pour éviter les conséquences d’un amalgame, la bonne approche pour prendre en compte les besoins spécifiques des personnes dans des situations de mouvements mixtes consiste à utiliser l’expression « réfugiés et migrants ». Cela permet d’identifier et de répondre correctement aux besoins des personnes concernées, en veillant à ce que les réfugiés aient accès à l’asile et à ce que les migrants vulnérables reçoivent le soutien adapté dont ils ont besoin. De manière plus générale, les réfugiés et les migrants devraient être collectivement appelés « individus », « personnes » ou « personnes en mouvement ».

Publié à l’origine par le HCR le 19 janvier 2024

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