Un groupe d'enfants non accompagnés à l'aéroport Eleftherios Venizelos d'Athènes embarque sur un vol à destination du Portugal dans le cadre d'un programme de relocalisation mené par l'UE

Un groupe d’enfants non accompagnés à l’aéroport Eleftherios Venizelos d’Athènes embarque sur un vol à destination du Portugal dans le cadre d’un programme de relocalisation mené par l’UE. © OIM/Christine Nikolaidou

Un programme en cours visant à relocaliser 1600 enfants non accompagnés depuis les îles grecques transforme déjà des vies.

Ahmad* est originaire d’Afghanistan et il n’hésite pas à résumer la manière dont la relocalisation depuis un camp sordide sur une île grecque vers le Grand-Duché de Luxembourg l’a affecté, lui et les autres enfants non accompagnés qui ont été relocalisés au Luxembourg.


« Jusqu’à présent, notre vie se résumait à un point d’interrogation », dit-il. « Maintenant, nous avons la stabilité. Je veux que ma vie se passe bien. Je suis libre. »

Ahmad compte parmi 59 enfants réfugiés vulnérables transférés au Luxembourg et en Allemagne en avril 2020, depuis des centres d’accueil dangereux et insalubres situés dans des îles grecques. Ce transfert a eu lieu au plus fort de la pandémie de Covid-19.

Dans les mois qui ont suivi, six autres ont rejoint l’Allemagne, 50 ont quitté la Grèce pour la Finlande, 25 sont arrivés au Portugal et 18 sont allés en Belgique. Vendredi, 49 autres sont arrivés en France, ce qui porte le total à 207.

Les enfants avaient fui les conflits dans leur pays d’origine et ont enduré des difficultés durant leur périple vers la Grèce. Beaucoup y ont passé des mois dans des abris de fortune, souvent dépourvus de toilettes et d’eau courante.

Pour le personnel du HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et de ses partenaires humanitaires, ces relocalisations sont une lueur d’espoir après les appels répétés en faveur de solutions pour les enfants.

« On pouvait lire le bonheur sur leurs visages. Ils se rendent compte que quelque chose de nouveau leur arrive », a déclaré France Matrahji, employée du HCR en charge de la protection sur l’île de Lesbos.

Onze Etats de l’UE se sont déjà engagés à transférer environ 1100 des 1600 enfants non accompagnés ciblés pour la réinstallation depuis la Grèce. Le pays compte actuellement un total de 4558 enfants non accompagnés. Environ 25% d’entre eux se trouvent dans les îles de la mer Égée.

Cet engagement a été significatif, a déclaré Philippe Leclerc, représentant du HCR en Grèce.

« Nous plaidons sur ce point depuis des années, en particulier depuis que la surpopulation des centres insulaires s’est aggravée en 2019. Nous avons recherché cette solidarité pour les plus vulnérables, comme les enfants non accompagnés qui restent trop longtemps dans les centres d’accueil des îles, à la frontière terrestre, qui vivent dans les commissariats de police ou qui sont sans abri », a-t-il déclaré.

« La première priorité doit être la sécurité et la prise en charge des enfants. »

« Ces relocalisations sont une bonne solution à la fois pour les enfants et pour la solidarité de l’UE envers la Grèce », a-t-il déclaré. « La première priorité doit être la sécurité et la prise en charge des enfants qui sont seuls en Grèce. »

« Le pays doit développer sa propre capacité à protéger les enfants non accompagnés avec le soutien de l’UE, mais la relocalisation dans des pays de l’UE de certains enfants parmi les plus vulnérables soulage également la pression sur le système grec », a-t-il ajouté.

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Un groupe d’enfants non accompagnés attend de prendre un vol depuis Athènes vers Lisbonne, dans le cadre d’un programme de l’UE pour la relocalisation. © HCR/Christine Nikolaidou
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Un groupe d’enfants non accompagnés arrive à l’aéroport Eleftherios Venizelos d’Athènes pour leur vol vers Lisbonne, dans le cadre d’un programme de l’UE pour la relocalisation. © HCR/Christine Nikolaidou
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Un groupe d’enfants non accompagnés passe par le dispositif de sécurité pour embarquer sur un vol Athènes-Lisbonne, dans le cadre d’un programme de l’UE pour la relocalisation. © HCR/Aris Athanatos
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Un groupe de jeunes enfants jouent dans un camp de fortune adjacent au centre d’accueil et d’identification de Moria, sur l’île grecque de Lesbos. © HCR/Achilleas Zavallis

La pandémie a retardé les transferts mais, en avril, le Luxembourg et l’Allemagne ont notifié à Athènes qu’ils prévoyaient de procéder dans des conditions strictes en raison du virus. Cela a déclenché une intense activité pour Eirini Agapidaki, secrétaire spéciale grecque pour la protection des mineurs non accompagnés, le bureau du HCR à Athènes, son personnel et ses partenaires sur les îles de Lesbos, Chios et Samos.

« Je suis très émue à chaque fois que je me trouve à l’aéroport pour saluer les enfants et leur souhaiter bonne chance. Tant de personnes sont très engagées et font tout leur possible pour faire fonctionner le programme de relocalisation afin d’offrir à ces enfants la possibilité d’un avenir brillant », a déclaré Eirini Agapidaki, dont le ministère soutient le bien-être, l’éducation et le logement des enfants.

Ils ont dû se soumettre à un compte à rebours de 48 heures avant le départ vers le Luxembourg. Des procédures d’évaluation de l’intérêt supérieur ont donc été menées pour les voyageurs potentiels et le personnel du HCR a travaillé avec des partenaires des ONG grecques METAdrasi et PRAKSIS, ainsi qu’avec l’EASO, l’organe européen compétent, pour sélectionner les cas à soumettre aux autorités en Grèce et au Luxembourg.

« Nous ne dormions pas. Nous avons travaillé 24 heures sur 24. »

Le personnel du HCR en Grèce se souvient de la course contre la montre pour mener les entretiens dans les centres d’accueil et d’identification dans le contexte des restrictions dues à la pandémie de Covid-19 et des formalités administratives détaillées. Chaque enfant devait rassembler, traiter et soumettre des documents. Chacun devait donner son consentement et, dans certains cas, les parents dans le pays d’origine devaient être consultés.

Une erreur bureaucratique peut compromettre les chances d’un enfant d’être relocalisé, a déclaré le personnel.

« Nous ne dormions pas. Nous avons travaillé 24 heures sur 24, nous menions les interviews, nous envoyions des courriels et nous assurions tous les suivis les uns après les autres », a déclaré France Matrahji.

Le personnel de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a préparé les enfants à leur départ, a effectué tous les contrôles de santé et les a accompagnés dans les pays d’accueil, ce qui constitue un autre exemple de bonne coopération entre les deux agences des Nations Unies.

Le HCR, l’OIM et l’UNICEF, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, ont établi des normes pour identifier et hiérarchiser les enfants en vue de leur relocalisation.

En tout, 12 enfants se sont rendus au Luxembourg, tandis que 47 sont allés en Allemagne. La plupart venaient d’Afghanistan, mais certains étaient originaires de Syrie et d’Érythrée. Presque tous sont des adolescents.

L’avion pour l’Allemagne a atterri à Hanovre. Après deux semaines de quarantaine en Basse-Saxe, les enfants se sont rendus à différents endroits pour commencer le processus d’intégration. Un tiers d’entre eux vivra avec des proches déjà présents en Allemagne, selon le porte-parole du HCR Chris Melzer.

Les deux pays ont accueilli les enfants.

Au Luxembourg, les enfants ont été logés dans un établissement situé dans le nord du pays, sous la supervision de Caritas Luxembourg, qui a déployé une équipe multidisciplinaire, comprenant un psychologue et des travailleurs sociaux qui parlent arabe, farsi et dari.

Faruk Licina fait partie de l’équipe d’accueil de Caritas Luxembourg. Il a déclaré que la quarantaine avait rendu les deux premières semaines difficiles. Les écoles étaient fermées et les enfants ont dû attendre pour commencer à apprendre les langues du pays.

« Tout s’est passé très vite. »

Il a expliqué que certains avaient souffert psychologiquement étant donné ce qui leur était arrivé ces dernières années mais, une fois installés, ils ont pu faire du sport ensemble et découvrir la ville où ils sont basés. Ils ont été mis à l’abri des regards, mais Ahmad a parlé à Licina de son nouveau sentiment de liberté et de stabilité.

Ils ont désormais des lits confortables, de la bonne nourriture et des perspectives plus stables, a déclaré Licina, ajoutant que l’expérience avait également été « très profonde » pour l’équipe de Caritas.

« Nous avons dû chercher une maison pour qu’ils puissent y vivre, pour obtenir l’autorisation. Le secteur de l’aide sociale était paralysé à cause de la pandémie de Covid, mais nous avons dû chercher des collègues pour nous aider à nous occuper d’eux », a-t-il dit.

« Chacun a fait son possible pour qu’ils soient bien accueillis », a-t-il dit.

*Le nom a été changé pour des raisons de protection.


Le projet de relocalisation est mené par le gouvernement grec avec les États membres de l’UE participants et est coordonné et financé par la Commission européenne. L’OIM, le HCR et l’UNICEF soutiennent pleinement tous les aspects du processus de relocalisation, en étroite collaboration avec des partenaires clés tels que le Bureau européen d’appui en matière d’asile.

Publie par le HCR, le 25 août 2020

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