Manar Al Sayer, une veuve syrienne de 29 ans, reçoit une allocation d'aide en espèces à Beyrouth

Manar Al Sayer, une veuve syrienne de 29 ans, reçoit une allocation d’aide en espèces à Beyrouth.
© HCR

Le HCR étend son assistance en espèces afin que des millions de bénéficiaires puissent répondre à leurs besoins dans la dignité, être protégés et devenir plus résilients.

Manar Al Sayer, une veuve syrienne, se tient devant un distributeur automatique à Beyrouth, elle saisit un code PIN et retire des livres libanaises.


Grâce à cette allocation en espèces, elle peut aujourd’hui prioriser ses dépenses mensuelles pour elle-même et ses trois enfants, Aseel, six ans, Abdullah, neuf ans et Osaima, 12 ans.

« J’alloue cette aide en espèces pour que mes enfants puissent aller à l’école le matin », explique-t-elle.

« Je l’utilise pour payer le transport scolaire de mes enfants et je suis très heureuse de pouvoir de nouveau gérer mes dépenses », ajoute-t-elle.

Déracinée de sa maison familiale à Homs par des bombardements en 2012, Manar s’est réfugiée au Liban voisin l’année suivante. Après que son mari a été tué dans un accident de la circulation, elle est maintenant chef de famille.

« Ce que nous achetons ne nous est plus imposé. »

Une fois qu’elle a payé les frais de scolarité de ses enfants, Manar peut établir un budget pour le reste du mois.

« J’ai promis à mes enfants de leur acheter des pantoufles avec une partie de l’aide financière de ce mois-ci. Je vais pouvoir le faire parce que j’ai de l’argent », ajoute-t-elle.

Cette femme de 29 ans compte parmi des millions de réfugiés et d’autres personnes relevant de la compétence du HCR dans des dizaines de pays à travers le monde. Ces personnes déracinées peuvent mieux contrôler leur vie depuis que le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, a commencé à accroître l’aide en espèces en 2016.

Le programme vise à aider les réfugiés, les demandeurs d’asile, les rapatriés, les personnes déplacées internes et les apatrides à satisfaire leurs besoins dans la dignité, à être protégés et à augmenter leur résilience. Ces deux dernières années, elle a permis d’aider 10,5 millions de personnes dans le besoin dans 94 pays, et le HCR fournit maintenant davantage d’allocations en espèces que d’aide en nature.

La majeure partie des sommes sont décaissées sans restriction, ce qui signifie que les réfugiés eux-mêmes peuvent gérer leurs dépenses. Cela profite à l’économie locale, car les réfugiés achètent des articles de première nécessité dans les magasins locaux et paient pour les services locaux.

« Avant, nous étions limités à dépenser l’aide financière en espèces dans les supermarchés. Maintenant que nous pouvons retirer l’argent en espèces, ils nous ont donné la liberté de choix. Ce que nous achetons ne nous est plus imposé », explique Manar.

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Une réfugiée signe les documents nécessaires pour recevoir sa carte de retrait à Athènes, Grèce, en septembre 2017. Les allocations en espèces donnent aux réfugiés la dignité du choix et encourage l’autonomie. © HCR/Yorgos Kyvernitis
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Des réfugiés syriens font la queue pour obtenir une aide en espèces pour l’équipement contre les conditions hivernales au camp de réfugiés de Zaatari, en Jordanie, en novembre 2017. L’aide permet aux réfugiés d’acheter du combustible pour le chauffage, des équipements d’isolation et des vêtements chauds. © HCR/David Azia
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Une jeune réfugiée syrienne tient une carte de retrait fournie par le HCR à l’intérieur d’un point de distribution à Tripoli, au Liban, en avril 2018. Elle utilisera l’argent pour subvenir aux besoins de ses filles, âgées de quatre et six ans. © HCR/Diego Ibarra Sánchez
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Une famille syrienne effectue ses courses de nourriture à Kilkis, en Grèce, après avoir reçu une aide en espèces, en février 2017. Le HCR a distribué 500 cartes de retrait à 1200 réfugiés résidant dans des appartements et des hôtels dans la région de la Macédoine, au centre du pays. © HCR/Yorgos Kyvernitis
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Samuda, 35 ans, réfugié rohingya et chef de famille monoparentale, reçoit une aide financière de la part du HCR au Bangladesh, en avril 2018. Elle dit : « La première chose que je vais faire, c’est rembourser nos dettes et ensuite nous utiliserons cet argent pour acheter de la nourriture ». © HCR/Caroline Gluck

Alors qu’elle accorde la priorité aux dépenses pour scolariser ses enfants, d’autres bénéficiaires, en Grèce, au Niger ou en Somalie, utilisent l’aide en espèces pour payer leur loyer, acheter des médicaments, rembourser des dettes voire démarrer des entreprises. Flexible et innovante, l’initiative aide même des personnes déplacées vivant dans certains des endroits les plus reculés où le HCR travaille, comme des camps au Niger.

Dans le camp de réfugiés de Tabareybarey au Niger, le HCR a distribué 2500 téléphones portables aux réfugiés. En utilisant des paiements électroniques sûrs et sécurisés – intitulés “Mobile Money” – le HCR aide 10 000 hommes, femmes et enfants qui ont fui l’insécurité au Mali.

Un message SMS informe les bénéficiaires qu’ils ont reçu leur aide. Ils peuvent ensuite retirer l’argent au magasin de téléphonie – une cabine rouge dans le camp – ou payer les marchandises directement avec leur téléphone dans les magasins locaux.

« Nous avons constaté que fournir de l’argent liquide plutôt qu’une aide en nature est l’un des meilleurs moyens de répondre aux besoins fondamentaux des réfugiés ici au Niger », explique Robert Heyn, employé du HCR en charge du programme pour l’aide en espèces dans le pays.

« C’est plus rentable, cela donne aux réfugiés la dignité de faire leurs propres choix et on constate également un impact positif sur l’économie locale. Cela profite à la fois aux réfugiés et à l’économie du pays d’accueil. »

« Cela profite à la fois aux réfugiés et à l’économie du pays d’accueil. »

Ceux qui reçoivent de l’argent via leur téléphone mobile n’ont plus besoin de détenir de l’argent liquide dans leur portefeuille. Ils peuvent accéder à leur argent « quand ils en ont besoin, quand c’est nécessaire, et ils peuvent aussi laisser de l’argent sur leur compte d’argent mobile », déclare Robert Heyn.

La flexibilité et la sécurité sont un avantage pour les réfugiés, parmi lesquels Zeinabu Warekoufaf qui est originaire du Mali. « Quand votre argent est dans votre téléphone portable, personne ne sait ce que vous avez et, si quelqu’un vous le prend, il ne saura pas combien vous en avez », dit-elle.

Lorsqu’elle se rend dans un magasin du site, Zeinabu utilise de l’argent comptant pour acheter du sucre, du thé et du couscous, ainsi que des écheveaux de laine de couleurs vives à partir desquels elle fabrique des coussins pour la vente. De nombreux commerçants ont augmenté leurs revenus, depuis que les réfugiés ont commencé à recevoir de l’argent et sont satisfaits de cet arrangement.

Le HCR espère que la liberté et la sécurité procurées par l’argent mobile permettront aux réfugiés comme Zeinabu de quitter les camps et de s’intégrer dans la communauté locale, où ils pourront vivre de manière plus indépendante et durable.

En 2016 et 2017, les deux premières années où le HCR a augmenté l’aide en espèces, l’organisation a distribué un total de 1,2 milliard de dollars, en partenariat avec les gouvernements, les agences des Nations Unies, les ONG et le secteur privé.

Les opérations les plus importantes à ce jour sont menées au Liban, en Afghanistan, en Jordanie, en Somalie, en Ukraine, au Soudan, en Irak, en Égypte, en Syrie et en Turquie, bien que des opérations aient depuis lors été déployées dans d’autres pays, dont le Bangladesh, où le HCR vient en aide à quelque 45 000 réfugiés rohingyas dans des installations informelles.

« La première chose que je ferai, c’est de rembourser nos dettes d’environ 200 taka (2,50 US), et ensuite nous utiliserons cet argent pour acheter de la nourriture », déclare Samuda, une mère qui élève seule avec sa fille de 15 ans, lors du lancement du projet pilote dans le sud-est du Bangladesh en avril dernier.

Les allocations d’aides en espèces couvrent tout le cycle du déplacement, depuis l’aide aux déplacés internes et au-delà des frontières de leur propre pays, jusqu’à l’aide à ceux qui choisissent de rentrer chez eux lorsque les conditions sont suffisamment sûres – et parmi eux, des milliers de Somaliens.

Près de trois décennies de guerre civile dans la Corne de l’Afrique ont déraciné plus de deux millions de personnes dans les pays voisins. Avec l’amélioration de la sécurité dans leur pays d’origine, 80 000 réfugiés sont déjà présent rentrés volontairement. Pour eux, l’argent en espèces s’avère vital alors qu’ils démarrent une nouvelle vie dans leur pays encore fragile.

Via son partenaire Amal Bank – qui offre une gamme de services financiers allant des transferts d’argent au micro-financement dans des villes et des régions reculées en Somalie – le HCR verse un ensemble d’allocations en espèces aux rapatriés, y compris une allocation en espèces unique, un soutien mensuel, des allocations pour chaque enfant et des subventions pour le logement. Dans une étape importante vers la réintégration complète, les rapatriés ouvrent également leur propre compte bancaire, ce qui permet de recevoir et d’économiser de l’argent.

Parmi les bénéficiaires se trouve une mère de cinq enfants, Aïcha, 55 ans, qui a passé 25 ans en tant que réfugiée à Dadaab, au Kenya. De retour en Somalie depuis le début de l’année 2017, elle a utilisé son allocation de réinstallation de 200 dollars pour ouvrir un petit magasin à Kismayo. On y trouve de tout, des bananes et des pastèques aux stylos.

Les rapatriés ont également leur propre compte bancaire, ce qui leur permet de recevoir et d’économiser de l’argent.

« Cela me permet de subvenir à la plupart des besoins de ma famille », dit-elle au sujet du magasin, approvisionné en articles achetés auprès de grossistes locaux en Somalie, un pays qui se remet sur pied après des décennies de guerre et d’instabilité.

D’autres utilisent leurs allocations en espèces et l’aide reçue pour acheter des terres et du bétail, ou démarrer une entreprise, comme Mohamed Noor Omar, 47 ans, qui a dû faire face à un avenir incertain dans le camp de réfugiés de Kakuma au Kenya après avoir fui la guerre civile dans sa Somalie natale au début des années 1990.

Avec l’attrait des allocations d’aide totalisant 1 600 dollars, il est retourné à Mogadiscio, la capitale somalienne, l’année dernière, où il a utilisé une partie de l’argent pour acheter un bateau de pêche. Il s’est également associé à un homme de la communauté locale qui avait un moteur pour le faire tourner.

Sur l’eau dès 6 heures du matin, il gagne de 7 à 10 dollars par jour, selon les prises, et cherche maintenant à améliorer son entreprise comme tout autre entrepreneur.

« Ce revenu est suffisant pour répondre à mes besoins essentiels », explique Mohamed, qui veut acheter de meilleurs filets pour attraper davantage de poissons, et un moteur hors-bord qui peut l’emmener plus loin en haute mer. « Comme ça, je peux encore améliorer mes conditions de vie. »

Reportages de Rima Cherri et Houssam Hariri au Liban, Caroline Gluck au Bangladesh, Robert Heyn au Niger, et Njoki Mwangi et Urayayi Mutsindikwa en Somalie.

Publie par le HCR, le 9 decembre 2019

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