Une femme vénézuélienne travaille comme volontaire communautaire pour des organisations partenaires du HCR.

Lucetti Ramos (au centre) aide ses compatriotes warao à se reconstruire une nouvelle vie dans leur pays d’accueil.
© HCR/Gabo Morales

Par Felipe Irnaldo et Jenny Barchfield à Manaus, au Brésil

Les membres de la communauté autochtone warao du Venezuela font face à de nombreux obstacles pour démarrer une nouvelle vie au Brésil. Mais certains de leurs compatriotes warao les aident à les lever.


Lucetti del Pilar Ramos Blanco possède un don inné pour apporter des solutions à divers problèmes.


Après que l’enseignante de 42 ans ait été forcée de fuir son foyer, il y a deux ans, dans le delta de l’Orénoque au Venezuela, elle a rapidement assumé un rôle de responsable dans le site d’installation où elle a trouvé refuge avec d’autres familles autochtones warao au Brésil voisin.

Du fait des conditions de vie précaires dans l’installation située au sein d’un bâtiment abandonné et localisé dans l’extrême-nord de Boa Vista, les besoins des personnes qui y ont trouvé refuge étaient innombrables. Lucetti a immédiatement retroussé ses manches et s’est mise au travail, dressant des listes des résidents et essayant d’identifier comment leur procurer la nourriture, des soins de santé et d’autres produits essentiels dont ils avaient besoin.

« J’essaie d’aider en informant et en orientant la communauté. »

L’ingéniosité de Lucetti a attiré l’attention de l’association d’aide Caritas Arquidiocesana de Manaus, un partenaire du HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, qui travaille dans la ville amazonienne de Manaus – l’un des principaux lieux d’arrivée des Warao qui ont fui le Venezuela. Ils ont offert à Lucetti un emploi pour aider ses homologues warao à démarrer une nouvelle vie dans ce pays qui leur était inconnu.

« Je leur rends visite [aux nouveaux arrivants], pratiquement comme si j’allais rendre visite à mes proches. Je discute avec eux, je prends note de leurs informations et j’identifie leurs besoins », dit-elle, ajoutant que son travail consiste à agir en tant qu’intermédiaire entre les membres de la communauté warao et Caritas. « J’essaie d’aider en informant et en orientant à la fois la communauté et l’institution. »

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Lucetti (en rouge) discute avec ses collègues chargés de l’aide humanitaire au siège de Caritas à Manaus. © HCR/Gabo Morales
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Lucetti et Keiver, 8 ans, examinent une carte de Manaus affichée dans les bureaux de Caritas, un partenaire du HCR. © HCR/Gabo Morales
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Dans le cadre de son travail, Lucetti sillonne plusieurs sites d’installation accueillant des indigènes warao et qui sont dispersés autour de Manaus. © HCR/Gabo Morales
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Marcelino et sa famille ont pu louer leur propre maison, grâce au revenu qu’il gagne en aidant d’autres membres de la communauté warao. © HCR/Gabo Morales
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Au Brésil, la ville de Manaus, située sur les rives du fleuve Amazone, abrite l’une des plus importantes communautés d’indigènes warao du Venezuela. © HCR/Gabo Morales

Le Brésil accueille plus de 300 000 réfugiés et migrants vénézuéliens qui ont fui l’insécurité ainsi que les pénuries de nourriture et de médicaments dans leur pays. Environ 7000 d’entre eux sont Warao, dont beaucoup sont arrivés au Brésil démunis et souffrant de malnutrition. Ces Vénézuéliens autochtones sont confrontés à des obstacles particulièrement difficiles pour couvrir leurs besoins fondamentaux et s’adapter à la vie au Brésil.

Dans ce pays de langue portugaise, ils sont souvent confrontés à une double barrière linguistique car beaucoup, en particulier les Warao plus âgés, ne s’expriment que dans leur propre langue et ne parlent que des rudiments d’espagnol. Pire encore, de nombreux Warao arrivent sans document, ou seulement avec des pièces d’identité périmées ou dont le nom est mal orthographié en raison de problèmes de communication précédemment rencontrés avec les autorités vénézuéliennes. A cause de ces problèmes, il leur est beaucoup plus difficile de trouver un emploi et un logement. De ce fait, de nombreux Warao dorment dans la rue et doivent mendier pour survivre.

Mais il y a de l’espoir, grâce à d’autres membres de la communauté warao, comme Lucetti, qui se mobilisent pour aider leurs compatriotes à surmonter les difficultés d’acclimatation à une nouvelle culture.

Lorsque des familles warao arrivent à Manaus, Lucetti passe immédiatement à l’action, accompagnant les nouveaux arrivants dans le cadre de la procédure de demande d’asile et veillant à ce qu’ils puissent accéder à des services essentiels tels que les soins de santé et l’éducation. Elle accompagne souvent les familles dans les bureaux de l’administration brésilienne ou au consulat du Venezuela pour les aider à surmonter les obstacles bureaucratiques.

Ses cas les plus difficiles concernent des mineurs qui arrivent parfois seuls ou avec des proches qui ne sont pas leurs parents. Les personnes âgées ont également du mal à s’adapter et nécessitent une attention particulière, explique Lucetti.

Un autre problème récurrent qui empêche parfois les autochtones warao de réaliser pleinement leur potentiel au Brésil concerne les règles de reconnaissance des diplômes universitaires et autres titres professionnels.

Le HCR travaille avec des partenaires et des universités sur une stratégie pour aider les réfugiés et les migrants vivant dans le pays à faire reconnaître leurs diplômes et autres titres professionnels. Toutefois, selon Lucetti, des ingénieurs, des infirmières, des avocats et des enseignants dans la communauté warao sont contraints, après leur arrivée au Brésil, d’occuper des emplois précaires en tant que journaliers, voire à mendier, car ils ne pouvaient pas travailler dans leur domaine.

Heureusement, cela n’a pas été le cas de Marcelino Moraleda Paredes, un Warao de 36 ans, également originaire du delta de l’Orénoque au Venezuela. Avant que son épouse et ses cinq enfants ne fassent le voyage vers le sud au Brésil en 2017, Marcelino avait passé plus d’une décennie à travailler pour le ministère vénézuélien de la Santé en tant que « facilitateur interculturel », aidant ses concitoyens warao à obtenir des soins dans leur hôpital local.

« Je sais quand un compatriote warao est malade, qu’il est à terre. »

Il aimait son travail mais, du fait de l’inflation galopante qui réduisait progressivement son salaire, Marcelino s’est rendu compte qu’il ne pouvait plus nourrir sa famille.

« Nous ne pouvions acheter que quatre ou cinq aliments par mois », se souvient-il, ajoutant « nous ne mangions qu’une seule fois par jour ».

Après quelques mois passés à charger et décharger des camions à Pacaraima, une ville frontalière entre le Brésil et le Venezuela, Marcelino a commencé à faire du bénévolat auprès d’une association humanitaire. Grâce à cette expérience, il a trouvé un emploi au sein de l’organisation locale ADRA, un partenaire du HCR et d’autres agences des Nations Unies. Il travaille désormais en tant qu’employé chargé du suivi de la santé et de la nutrition parmi ses compatriotes warao.

Marcelino sillonne les lieux de refuge pour leur communauté dans la ville de Manaus, discute avec les résidents et les nouveaux arrivants pour comprendre leurs besoins médicaux et nutritionnels et les aider à obtenir toute l’aide dont ils pourraient avoir besoin.

« Je sais quand un collègue warao est malade, qu’il est à terre », explique Marcelino.

Ce travail lui a permis, ainsi qu’à sa famille, de quitter le refuge pour emménager dans un modeste appartement de deux pièces. Ses compétences et ses connaissances, comme celles de Lucetti, ont également servi à aider les réfugiés et migrants warao dont ils s’occupent. Tous deux ont aidé des centaines de familles warao à démarrer une nouvelle vie au Brésil.

« Pour moi, c’est très satisfaisant », déclare Lucetti avec fierté.

 

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Publie par le HCR, le 19 avril 2022.

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