Juan Manuel Pedraza passe ses journées à numériser les documents de milliers de personnes ayant demandé l’asile au Mexique. © HCR/Pierre-Marc René
Ce programme de numérisation soutenu par le HCR et financé par le gouvernement du Canada a été essentiel pour répondre au nombre croissant de demandes d’asile au Mexique, qui a dépassé tous les records en 2023, lorsque plus de 140 000 personnes ont demandé une protection internationale dans le pays
Par Pierre-Marc René à Tapachula au Mexique
Juan Manuel Pedraza (32 ans) passe ses journées à numériser les documents de milliers de personnes ayant demandé l’asile au Mexique.
« Bien qu’il s’agisse de chiffres et de feuilles de papier, chaque dossier représente la vie d’une personne, la raison de son départ, sa peur fondée si elle en a une, afin qu’elle puisse demander l’asile ici au Mexique », explique le jeune homme, responsable des archives de la Commission mexicaine d’aide aux réfugiés (COMAR) à Tapachula.
Juan Manuel fait partie d’une équipe nationale qui a consacré d’innombrables heures à la transformation numérique de la COMAR. Ce programme soutenu par le HCR et financé par le Gouvernement du Canada a été essentiel pour répondre au nombre croissant de demandes d’asile au Mexique, qui a dépassé tous les records en 2023, lorsque plus de 140 000 personnes ont demandé une protection internationale dans le pays.
À Tapachula, l’équipe a numérisé plus de 191 000 dossiers et, pour Juan Manuel, chacun d’entre eux représente l’histoire de chaque personne fuyant son pays pour sauver sa vie ou trouver un endroit où vivre en paix.
« Il est très important pour nous de traiter ces dossiers avec dignité, car notre objectif est de donner de la dignité aux archives, de respecter les dossiers et de respecter les gens et de faciliter leur procédure d’asile dans ce pays », explique-t-il, visiblement passionné par ce qu’il fait.
« On m’a proposé d’aller travailler dans d’autres département comme la protection ou le registre, mais je crois sincèrement que le travail dans les archives est très noble. C’est un travail dans lequel nous avons la capacité de sauvegarder, de protéger l’histoire de la vie d’une personne”, ajoute-t-il.
Auparavant, les dossiers n’étaient archivés que sur papier. L’équipe de Tapachula, dirigée par Juan Manuel, a donc eu une lourde tâche à accomplir. Après avoir participé à une formation, l’équipe peut désormais numériser jusqu’à 150 dossiers par jour.
Si plus de 60% des demandes d’asile reçues par la COMAR dans l’ensemble du pays sont enregistrées à Tapachula, le programme de numérisation soutenu par le Canada couvre les besoins à l’échelle nationale et a permis de numériser plus de 251 000 dossiers à Tijuana, Palenque et Mexico.
« Lorsque nous prenons le temps de lire les dossiers, nous nous rendons compte que les gens ne quittent pas leur pays parce qu’ils le veulent. Les gens partent parce qu’ils ont besoin d’une protection que leur pays natal ne pouvait pas leur offrir, et pour nous, protéger ce dossier, protéger cette histoire, protéger les preuves qu’ils apportent, parfois des photos très difficiles à voir, parfois des audios, parfois des captures d’écran de conversations numériques, c’est sauvegarder l’intégrité des personnes, avant tout parce que ces personnes méritent un traitement digne et humain », affirme Juan Manuel.
La numérisation a aidé la COMAR à répondre plus rapidement aux demandes d’information, car elle permet à ceux qui ont accès au système d’information sur les réfugiés (SIRE) de consulter les dossiers en temps réel et de fournir une réponse rapide aux demandeurs d’asile.
Elles permettent également à l’Institut national de l’Immigration de vérifier si les personnes ont une procédure d’asile en cours, d’éviter les expulsions et de garantir la protection internationale, ainsi que de certifier des données ou des informations et d’être en mesure de délivrer des documents tels que la résidence permanente. Les archives numériques ont également facilité et accéléré les processus de réponse aux réfugiés qui cherchent à reconstruire leur vie dans le cadre du programme d’intégration locale dirigé par le HCR. Les informations, accessibles en temps réel, facilitent la réinstallation des personnes dans d’autres villes du pays où les opportunités d’emploi sont plus nombreuses, avec le soutien du HCR, des autorités mexicaines et de leurs partenaires.
« Je suis très heureux dans mon travail aux archives, car elles nous permettent d’apporter une contribution à cet immense océan qu’est le traitement des demandes d’asile au Mexique. Chaque département et chacun de mes collègues est un engrenage qui nous permet de mener à bien les tâches qui nous incombent. Nous avons de nombreuses lacunes, nous avons beaucoup à faire, mais en fin de compte, avec ce que nous avons, nous faisons le travail. Notre travail est une petite partie de cette grande recette pour que les gens puissent profiter d’un plat appelé le refuge”, conclut Juan Manuel.
Depuis 2021, le HCR, avec le soutien financier du Gouvernement du Canada, a développé différents projets pour renforcer la capacité et d’améliorer les processus du système d’asile au Mexique. Ces projets ont contribué à la transformation numérique de la COMAR, à la réorganisation des archives physiques et à la mise en œuvre d’un système robuste de suivi et de traçabilité des dossiers des demandeurs d’asile. Grâce notamment à la transformation numérique, la COMAR a pu quadrupler ses capacités de réponse au cours des dernières années.
Publié par le ACNUR le 1 Juillet 2024.