Hieu Pham-Fraser

Une photo de Hieu. © Courtoisie de Hieu Pham-Fraser

Dans les années 1970 et 1980, le Canada a accueilli des milliers de réfugiés, souvent appelés « boat people », qui fuyaient les persécutions politiques après la fin de la guerre du Vietnam. Hieu Fraser et ses parents en faisaient partie.


Aujourd’hui âgée de 47 ans et vivant en Colombie-Britannique, Hieu est enseignante et a publié des livres pour enfants dans lesquels elle utilise sa voix pour défendre la cause des réfugiés. Cette auteure canadienne d’origine vietnamienne explique pourquoi il est aussi important pour elle de participer à la campagne #JeSuisUnDéfenseur.


Ajoutez votre nom à la pétition #JeSuisUnDéfenseur et rejoignez le HCR en envoyant ce message clair : toutes les personnes comptent, et la xénophobie et le racisme doivent cesser dans le monde.

Quelle a été votre expérience lorsque vous avez fui le Vietnam et êtes arrivée au Canada?

Mon père, qui était capitaine de la marine à l’époque, nous a aidés à nous échapper dans un bateau de pêche avec 128 autres Vietnamiens à son bord. Nous avons débarqués sur les côtes thaïlandaises et sommes restés pendant près d’un an dans le camp de réfugiés de Songla. Le camp avait été créé et financé par les Nations Unies. Je suis consciente que sans l’intervention des Nations Unies, nous n’aurions eu aucun endroit sûr où nous réfugier. Ce sont également les Nations Unies qui ont plaidé en notre faveur et organisé les entretiens avec les délégués de nombreux pays, dont le Royaume-Uni, le Danemark, l’Australie et tant d’autres.

Finalement, le Gouvernement canadien nous a proposés de venir nous y réinstaller. Nous sommes arrivés par avion à Montréal parce que mes parents parlaient couramment français. Après quelques jours, ma mère – qui ne demandait jamais rien – a demandé à ce que nous soyons relocalisés dans « la région la plus chaude du pays ». C’est à ce moment-là que nous avons été mis en relation avec une paroisse de l’Église Unie qui attendait d’offrir un parrainage. Le Gouvernement canadien nous a donné des manteaux et 20 $, et nous a transportés par avion jusqu’à Victoria où nous avons été pris en charge. Nous nous sommes finalement installés dans une petite ville de l’Île de Vancouver, en Colombie-Britannique.

FAITES UN DON POUR LES RÉFUGIÉS

 

Qu’est-ce qui vous a incitée à écrire le livre pour enfants The Little Girl, dans lequel vous décrivez la vie d’une petite fille réfugiée arrivant au Canada et tentant de s’adapter au système scolaire dans les années 1980?

En fait, j’ai écrit cette histoire il y a quelques années déjà. Le fait d’écrire sur mon histoire m’a aidée à me reconnecter à mon passé, à l’accepter et à commencer à être fière de mon identité. J’ai aussi écrit ce livre pour mes élèves. En tant qu’enseignante, j’avais remarqué que beaucoup de mes élèves avaient changé ou anglicisé leur prénom. Lorsque je les interroge à ce sujet, beaucoup admettent qu’ils aiment leur prénom dans leur langue maternelle, mais ils pensent que l’école les acceptera mieux s’ils changent de nom.

Je voulais également que les gens comprennent que, même si le fait d’avoir été réfugiée a été l’une des choses les plus difficiles de ma vie, cela ne définit pas qui je suis. Je suis comme des milliers d’autres réfugiés dans le monde qui font preuve de résilience, de débrouillardise, de bonté et sont capables de devenir des leaders et de contribuer à la société qui les a accueillis. Je veux que les enfants réfugiés puissent être fiers des difficultés qu’a surmontées leur famille à cause de leur statut de réfugié. Je veux qu’ils puissent rêver à un avenir prospère au même titre que les autres citoyens du pays.

The Little Girl

Une photo du livre de Hieu. © Courtoisie de Hieu Pham-Fraser

Dans la campagne #JeSuisUnDéfenseur, nous avons voulu communiquer l’idée qu’être réfugié est un mode d’existence et ne définit pas toute l’identité ou l’essence d’une personne. D’après votre expérience, pouvez-vous nous raconter la manière dont les anciens réfugiés installés dans des pays comme le Canada, où ils sont protégés de la violence et de la persécution qu’ils subissaient dans leur pays, parviennent à réussir et à s’épanouir dans leur vie?

Oui! Je me souviens que dans mon cours d’anglais langue seconde, presque tout le monde dans la classe était réfugié! Je suis d’ailleurs toujours en contact avec certains de mes anciens camarades de classe. Nous sommes désormais devenus des adultes indépendants menant une vie ordinaire. Mes amis et moi souhaitons la même chose que les autres : une famille, des amis, un logement sûr, une carrière qui nous épanouit, des choses essentielles en soi. Sauf que pour nous, avoir une vie ordinaire relève du miracle, et j’en suis consciente chaque jour.

En tant que militante pour les droits des réfugiés, quel genre de soutien, de communauté et d’aide les réfugiés ont-ils besoin, selon vous, lorsqu’ils s’installent au Canada?

Cela me fait penser au dicton : « Il faut tout un village pour élever un enfant. » Lorsque les nouveaux arrivants s’installent au Canada, ils ont besoin de l’aide de toute la société. Les parents auront besoin d’un logement, d’un emploi et de cours de langue; les enfants devront se sentir en sécurité et soutenus à l’école et dans leur quartier; et les personnes organisant les parrainages devront être formées et recevoir les ressources adéquates pour les soutenir de manière positive et sans discrimination. C’est plus facile à dire, car chaque domaine est complexe et exige que nous fassions tous notre part. Que l’on ait été en contact avec une personne réfugiée ou non, le fait d’être curieux, d’être prêt à apprendre ou d’offrir ses compétences, son temps ou de l’argent peut faire une grande différence dans la vie des familles et des réfugiés nouvellement arrivés.

Le Canada aide depuis longtemps les réfugiés. Pourquoi est-il important de faire passer les questions relatives aux réfugiés au premier plan des discussions, que ce soit au Canada ou au niveau international?

Aujourd’hui, plus qu’à tout autre moment de l’histoire, nous n’avons jamais eu autant de personnes déplacées dans le monde. L’urgence de réinstaller les réfugiés n’a jamais été aussi pressante qu’aujourd’hui. Beaucoup de personnes ont encore des préjugés négatifs à l’égard des réfugiés et nous devons y remédier. Mettre les questions relatives aux réfugiés au premier plan nous permet d’apprendre, de discuter et de décortiquer l’expérience complexe des réfugiés, afin de devenir de meilleurs alliés et d’œuvrer pour un monde plus pacifique et durable.

Qu’aimeriez-vous dire à la population canadienne sur l’importance d’aider les réfugiés?

En aidant les réfugiés, nous investissons de manière pérenne dans la société. Beaucoup de réfugiés que je connais dans mon travail et dans ma vie personnelle sont incroyablement résilients, ingénieux, travailleurs, flexibles et capables d’apprendre vite. Tous ces atouts représentent les qualités de ceux qui réussissent. Les réfugiés ont également un vécu unique qui peut fournir une perspective inestimable à la société, au monde du travail et aux institutions dont ils font partie.

Signez la pétition #JeSuisUnDéfenseur

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