Tefera Tewodros, un médecin éthiopien réfugié, se tient dans la clinique de Hamdayet, à l’est du Soudan.

Tefera Tewodros, un médecin éthiopien réfugié, se tient dans la clinique de Hamdayet, à l’est du Soudan. © HCR/Giulia Raffaelli

Avec des ressources limitées, un médecin éthiopien met ses compétences et sa formation au service de ses compatriotes réfugiés dans le besoin au Soudan.

Par Doris Kuen et Giulia Raffaelli à Hamdayet, Soudan 

Le médecin Tefera Tewodros comptait parmi les premiers réfugiés qui ont rejoint l’est du Soudan en quête de sécurité au début de la crise, en novembre dernier, dans la région du Tigré en Ethiopie.

Depuis lors, il vit et travaille au dispensaire de la ville frontalière de Hamdayet, dans l’État de Kassala, où la majorité des 60 000 réfugiés ayant fui le conflit en Éthiopie ont trouvé abri.

Né en Érythrée, Tefera Tewodros a déménagé après l’indépendance en Éthiopie, où il a obtenu son diplôme de médecine et est devenu chirurgien. Ces dernières années, il travaillait en tant que chirurgien à Humera. Il menait une vie agréable et n’aurait jamais imaginé qu’il devrait fuir avec pour seule possession les vêtements qu’il portait ce jour-là.

« Les premiers jours en tant que réfugié ont été les pires de ma vie. C’était déroutant et traumatisant. Je ne savais pas exactement ce qui se passait. Je n’arrivais pas à réfléchir », se souvient le médecin qui n’avait aucune nouvelle de ses proches car toutes les communications étaient coupées.

Mais le 16 novembre, tout a changé. Interloqué par le nombre de personnes qui traversaient la frontière, dont beaucoup étaient malades ou blessées, il a compris qu’il devait intervenir et apporter son aide. Il est allé offrir son soutien au HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et à la Commission soudanaise pour les réfugiés (COR) au centre de transit de Hamdayet. Dès le lendemain, il a commencé à faire du bénévolat au centre de santé, qui est géré par le Croissant Rouge soudanais.

« Les premiers jours en tant que réfugié ont été les pires de ma vie. C’était déroutant et traumatisant. »

Malgré les longues heures de travail, le manque de personnel et de matériel médical, Tefera Tewodros a trouvé un nouvel objectif dans son travail.

« Je n’avais jamais travaillé avec autant de motivation, et ce dès le premier jour », ajoute-t-il.

Avec ses collègues, il s’occupe quotidiennement de centaines de patients au poste de santé de Hamdayet, un établissement qui ne compte que deux pièces – l’une utilisée comme bureau et service de consultations externes et l’autre servant de laboratoire pour les maladies infectieuses, de pharmacie et de stockage. Il fonctionne également comme un mini-hôpital avec une table d’opération et de réanimation, qui était autrefois le lit du médecin.

« Je dors désormais sur une natte derrière la clinique », dit-il.

Bien qu’il soit parfois dans l’incapacité d’exploiter pleinement son potentiel, en raison des circonstances difficiles, il continue à travailler en tant que bénévole dans l’établissement médical.

« Au moins, je fais quelque chose de bénéfique pour mon peuple et je suis fier de soutenir également la communauté locale », explique-t-il.

Il forme actuellement huit volontaires pour aider aux activités quotidiennes de la clinique.

« Il faut du temps pour les former car on leur demande maintenant d’aller au-delà de leur travail de routine, au milieu de nombreux défis », indique-t-il.

Mais il ajoute qu’il remporte parfois de petites victoires.

« L’un de nos stagiaires nous a quittés récemment pour commencer un travail dans une clinique voisine », dit-il.

« Je dors désormais sur une natte derrière la clinique. »

Tefera Tewodros soutient son peuple non seulement en tant que médecin expérimenté, mais aussi en tant que personne confrontée à une situation similaire et qui comprend le traumatisme du déracinement.

« Les sentiments endurés ne se traduisent pas facilement par des mots », dit-il, ajoutant qu’il est convaincu que le fait de partager la langue et la culture de ses patients renforce sa capacité à les aider.

Outre son travail à la clinique, le médecin passe son temps libre limité à parler avec ses amis et sa famille à l’étranger, en Europe, aux États-Unis et dans d’autres pays. Son ultime espoir est de revenir à la vie qu’il menait avant de quitter l’Éthiopie.

D’ici là, alors que plus de 30 000 réfugiés ont été transférés depuis des zones frontalières vers les installations d’Um Rakuba et de Tunaydbah, dans l’État de Gedaref – pour leur offrir la sécurité et de meilleures conditions de vie – il s’est engagé à rester à Hamdayet et à continuer à aider la communauté.

Publié par le HCR, le 23 février 2021.

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